De l’éloge des pâtes… par Tonino Benacquista

Les pâtes… c’est le royaume suprême de la forme. C’est de la forme que naîtra le goût.
 
C’est là qu’on s’aperçoit que l’arrondi a un goût, le long et le court ont un goût, le lisse et les stries aussi.
 
C’est parce que la vie elle-même est si diverse et si compliquée qu’il y a autant de formes de pâtes. Chacune d’elles renvoie à un concept. Chacune va raconter une histoire. Manger un plat de spaghettis, c’est comme imaginer le désarroi d’un être plongé dans un labyrinthe, dans une entropie inextricable de sens, dans un sac de noeud. Il lui faudra de la patience et un peu de dextérité pour en venir à bout.

 

Regardez comment est fait un plat de lasagnes, vous n’y verrez que la couche apparente, le gratin qu’on veut bien vous montrer. Mais notre individu veut voir les strates inférieures, parce qu’il est sûr qu’on lui cache des choses profondément enfouies. Pour s’apercevoir petu-être qu’il n’y a rien de plus qu’en surface.
 
Il n’y a rien de plus creux, de plus vide, et de plus mystérieux que dans un simple macaroni. En revanche, le ravioli, lui, renferme quelque chose, on ne sait jamais vraiment quoi, c’est une énigme dans un coffre qu’on n’ouvre jamais, une boîte qui va intriguer notre sujet par ce qu’elle recèle.

 

Vous savez, on prétend qu’à l’origine ces raviolis étaient destinés aux navigateurs. On enveloppait des restes de viandes et de bas morceaux hachés dans une fine couche de pâte, en espérant que le marins ne chercheraient pas à savoir ce qu’il mangeaient.
 
– Vraiment ? Et le tortellini, ça peut rappeler quoi? L’anneau, la bague ?
 
– Pourquoi pas le cercle, tout simplement. L’histoire sans fin. La boucle. Partir. Pour retourner forcément là d’où l’on vient.

Extrait du polar « La commedia des ratés » de Tonino Benacquista

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D’autres suivront puisque nous avons jusqu’à fin février pour y participer.

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2 Responses

  1. Merci beaucoup, je ne connaissais pas cet extrait, c'est fou ce qu'on peut prêter d'intention à la pasta !

  2. Frédérique dit :

    C'est bien trop court!!!!!!!! je reste sur ma "faim"…..c'est magique la façon de décrire un sentiment, un état d'être avec des pâtes…..J'ai énormément aimé….Merci Ma Marie et gros bisous.

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