Salade de pissenlits aux lardons et à l’oeuf poché

A cette saison où les pissenlits sont encore tendres, Monsieur le curé parcourt la campagne pour son denier du culte. Il va à pied, lisant son bréviaire. Il est soudain distrait par une bande de paroissiennes qui tatassent au fond d’un pré, baissées pour faire ample moisson de cette salade à bon marché. Comme il ne distingue pas la nature de leur cueillette, il les interpelle de loin :

« Oh ! les filles ! Que récoltez-vous donc là, dans vos grands paniers, avec vos cotillons retroussés ? »

L’une des bavardes, pas la plus effarouchée, se relève, poings sur les hanches pour reposer ses reins qu’elle cambre et lui répond malicieusement :

« Ah ! Monsieur le curé ! C’est des cocus. Dame ! Faut bien gagner sa vie comme on peut quand on n’est point riche. On se presse avant qu’ils fleurissent. »

Monsieur le curé proteste un peu, amusé et paternel :

« Oh ! Ma fille ! Des cocus ? on ne dit pas ça… Mais de quoi vivez-vous donc quand il n’y en a plus ? »

La question n’embarasse guère l’effrontée :

« Rassurez-vous, Monsieur le curé !  Des cocus, quand y’en a plus, on en fait ! »

Vu de mon clocher, Yvon Pean – Collection Gens d’ici – Editions Cheminement, 2001

Yvon Pean, disparu en 2009, était un poète patoisant de l’Anjou. Il a écrit des poèmes, des contes, des romans, C’était un grand défenseur du parler d’anjou et de la culture paysanne dont il était issu.

Je vous conseille cet ouvrage, « Vu de mon clocher« , où il brosse de manière truculente les portraits de personnages hauts en couleur. Des petits textes courts où on retrouve tout l’amour qu’il portait aux gens de la campagne et à son Anjou natal.

Je ne les ai pas cueillis par les racines, ces pissenlits, je n’ai donc pas eu l’occasion de faire l’effrontée en croisant Monsieur le curé sur les sentiers vicinaux de Soullans.

Je les ai trouvés dans mon 8 à 8 habituel, leurs petits bouquets couleur vert et jaune tendre m’ont titillé l’appétit et donné l’envie de les préparer en salade gourmande.

Pour la salade, y’a pas plus simple :

quelques coeurs de pissenlit,
1 pomme granny smith
quelques dés de fromage (tome des Pyrénées en l’occurence)
100 g de lardons fumés (ou éventuellement de jambon)
1 échalote
1 oeuf
fleur de sel, poivre,
huile à la truffe (facultatif : à défaut huile d’olive)
vinaigre de Xérès
1 càc de moutarde forte à l’ancienne
Quelques pétales de tomates confites (facultatif)

PREPARATION

Lavez soigneusement la salade dans une eau vinaigrée ; essorez puis réservez.

Coupez la pomme en petits dés, citronnez pour éviter qu’ils noircissent.

Dans une poêle, faites revenir à l’huile d’olive l’échalote ciselée puis les dés de lardon ou de jambon, quand ils sont dorés, déglacez avec un trait de vinaigre de Xérès. Réservez à part les lardons et le jus de cuisson.

Dans un bol, préparez la vinaigrette : commencez par mélanger une càc de moutarde avec 1 càs de vinaigre de Xérès, poivrez puis ajoutez l’huile d’olive (2 càs) ; ajoutez le jus de cuisson des lardons dans le bol et mélangez. Ajoutez aussi les tomates confites coupées en petites lanières fines.

Répartissez la salade dans l’assiette ; parsemez de dés de pommes, de lardons et de fromage également coupés en dés. Versez la vinaigrette et retournez la salade.

Faites bouillir de l’eau salée avec un trait de vinaigre de vin blanc, dès reprise de l’ébullition mettez à pocher l’oeuf ;  retirez-le au bout d’une minute, ébarbez et ajoutez-le sur le dessus de votre salade.

Parsemez de quelques grains de fleur de sel ; ajoutez quelques croûtons de pain grillé frotté à l’ail.