Touchez pas à mes ostréiculteurs
Ce matin, comme beaucoup de mes dimanches, je suis allée au marché de ma petite commune et j’ai acheté des huîtres de Bouin à l’ostréiculteur présent toutes les semaines, Nicolas Burgaud. Rien que de très normal, en temps normal je ne le signalerais même pas.
Sauf que le monde ostréicole subit de plein fouet des attaques depuis décembre dernier et que ça me met grave en colère.
Quel est le problème ?
Une partie de la baie de Bourgneuf en Loire-Atlantique juste avant Noël, Arcachon en Gironde peu avant les fêtes de nouvel an, puis en début d’année celles de Talmont-Saint-Hilaire une fois de plus en Vendée et récemment une nouvelle zone vendéenne, celle de la Coupelasse sur le secteur de Bouin, qui impacte un ostréiculteur du port des Champs, réputé pour la qualité de sa production, médaillé de nombreuses années au Salon de l’agriculture, voici le tableau actuel des dommages en espérant que ça n’évolue pas défavorablement dans les jours, semaines à venir. On peut s’inquiéter, vu la vitesse à laquelle les préfectures dégainent leurs interdictions de commercialisation des huîtres.
En effet, Il suffit d’une bourriche de 50 huîtres touchée par le norovirus – sur 7 tonnes écoulées qui n’ont provoqué aucun souci auprès des consommateurs, comme le signale lui-même l’ostréiculteur Baptiste Raimbaud sur sa page Facebook, pour que la Préfecture de Vendée décide – sans coup férir, un vendredi soir avant la fermeture des bureaux (!) – d’interdire la pêche, le ramassage et la commercialisation des huîtres et des coquillages sur toute la zone concernée de la Coupelasse (Attention : je précise bien qu’à l’heure où j’écris ce billet, de nombreux autres ostréiculteurs ne sont pas impactés… mais jusqu’à quand ?). Je vous laisse regarder la vidéo où Baptiste exprime toute sa colère en jetant les bourriches d’huîtres invendues devant les bureaux des services vétérinaires.
C’est dégueulasse !
Pardonnez-moi, mais je ne trouve pas d’autre mot, tant je trouve lamentable qu’on mette en péril toute une profession artisanale. Parce que la préfecture, elle l’ouvre large le parapluie, en se moquant bien – même si elle va clamer le contraire – des petits artisans qui se battent pour maintenir un patrimoine gastronomique local, en pleine période de production maximale, artisans qui vont souffrir et pâtir de ce qui relève en réalité d’un problème de stations d’épuration. Car il est là le souci, comme l’explique Frédéric Moulin, ostréiculteur et vice-président du comité régional de la conchyliculture des Pays de la Loire en reportant les résultats de l‘IFREMER sur France 3 Pays de la Loire :Le réseau n’est pas étanche, donc quand les nappes phréatiques remontent à la surface, et viennent gorger les tuyauteries d’assainissement du coup l’eau arrivée sur les stations d’épuration est trop importante, de ce fait on ne peut pas traiter l’eau qui arrive dans ces stations d’épuration ».
Alors on tape sur qui ?
Sur les doigts de l’artisan, c’est tellement plus simple et plus rapide.
L’autre problème qui surgit, c’est que la suspicion étant bien installée dans l’esprit du consommateur, celui-ci va fantasmer, avoir peur de se rendre malade, et les ostréiculteurs vont devoir se battre pour les rassurer à l’avenir. Aujourd’hui, c’est toute une profession qui pleure ses huîtres.
Et maintenant, on fait quoi ?
Je me pose la question : si les élus ne bougent pas le petit doigt pour traiter le problème des stations d’épuration et au vu des problèmes climatiques auxquels nous sommes confrontés, les ostréiculteurs auront-ils tous les ans le couperet au-dessus de leur tête ?
Donc ce midi, je vais manger mes huîtres de Bouin accompagnées de mon petit verre de muscadet, et si je vais faire popo plus souvent que d’habitude à cause d’une fichue gastro, tant mieux ! J’aurai peut-être perdu 1 kilo sur la balance, ça m’arrange.
J’aime mes artisans, j’aime mon terroir, pas envie de « bouffer » des produits importés de CEE voire de plus loin, pas touche à mes ostréiculteurs ! Pour rappel, ou pour information à l’attention de ceux qui l’ignorent, cet été la ville de Bouin a été classée Site remarquable du goût grâce à ses ostréiculteurs.
Bravo à eux !