De l’art de cuisiner aphrodisiaque… pour un tag
Je n’avais pas oublié le tag de Florence, mais pas pris le temps, c’est vrai, d’y répondre… il y a tellement de tags qui fleurissent sur tous les blogs, et à toutes saisons !!
Enfin, là c’est plutôt sympa, plutôt que de se regarder dans un miroir et parler de soi-même, il faut ouvrir son livre de chevet à la page 123 et recopier la cinquième phrase et les quatre suivantes…
Bon, j’ai triché… je n’ai pas de livre de chevet… je suis allée chercher un livre que j’adore consulter à mes heures perdues et j’ai plutôt cherché ce qu’il y avait de plus amusant à vous raconter.
Ce livre c’est :
« L’Histoire à Table – Si la cuisine m’était contée…
André Castelot aux Editions Plon-Perrin
L’ouvrage se présente comme une encyclopédie et à chaque lettre l’auteur, parfaitement documenté, cite des références toutes liées au monde culinaire depuis le Moyen-Age, avec parfois des articles truculents.
J’ai donc choisi… tout à fait par hasard !… ne me demandez pas pourquoi… à la lettre A : aphrodisiaque…
« … De tout temps les cuisiniers habiles se sont évertués à « euphoriser » leurs plats. Au Moyen Age, ils y furent fortement aidés par les Croisés qui apportèrent à l’Europe, où la nourriture était trop fade, les ardentes épices telles que le poivre – à tout seigneur tout honneur – le musc, l’ambre, la cannelle, la girofle, la muscade, le gingembre, la cantharide, la menthe qui passait alors pour inciter particulièrement à la luxure.
Le gibier n’était pas innocent non plus. Nos pères le pratiquaient depuis toujours, mais après le retour des Croisés, ils l’assaisonnèrent davantage encore ! Le café fut jugé à son arrivée comme un excellent stimulant érotique. Quant à la fève, lascive en diable, c’est tout juste si on osait en parler ! Il y avait en elle, disait-on, un certain relent de saturnales qui la rendait suspecte. Dans ses « propos de table du Figaro », James de Coquet raconte qu’au XVIIIe siècle le coadjuteur de l’évêque de Nice avait défendu qu’on en servît dans les couvents, parce qu’elle « produisait des effets incompatibles avec la vie monastique ».
Cusnonsky, dans « la table et l’amour » ne parle pas de la fève, mais de l’ambre, et – c’est assez inattendu – de l’artichaut.
Mme du Barry se parfumait à l’ambre, le maréchal de Richelieu en mangeait. Il se maria sous les trois règnes successifs de Louis XIV, Louis XV et Louis XVI, et faillit être père à quatre-vingt-dix ans, la mort mettant seule fin à ses prouesses, cet amant infatigable croquait des dragées à l’ambre ! Il faut croire qu’il dut en abuser, puisqu’à la fin de sa vie, complètement édenté, il se nourrisait exclusivement de viandes en purée.
L’artichaut serait, parait-il, un excitant tel qu’autrefois on interdisait aux jeunes filles d’en manger. Furetière écrit dans « le roman bourgeois » en 1666 : « Si quelqu’une de vous eût mangé de l’artichaut, on l’aurait montrée du doigt, mais aujourd’hui les jeunes filles sont plus effrontées que des pages de la cour. »
La truffe possède, elle aussi, des effets extraordinaires. Galien avait déjà remarqué qu’elle produisait « une excitation générale qui disposait à la volupté ». Un couplet du XVIIIe siècle le dit aussi et fait parler la truffe en ces termes :
Je suis pour une belle
Un ragoût si charmant,
Lorsque son ardeur est extrême,
Qu’elle a plus de profit et de contentement
A me donner à son Amant
Qu’à me garder pour elle-même.
Henri IV dut la vie à un pâté de foie truffé (sans doute arrosé de Jurançon) que son père mangea, dit-on, neuf mois avant la naissance du futur roi. On raconte qu’au moment du mariage de Louis XV avec Marie Leczinska, les dames de la Halle vinrent présenter leurs félicitations à la nouvelle reine en lui offrant des truffes :
« Manges-en beaucoup, dirent-elles, et il faut en faire manger beaucoup au roi, car cela est fort bon pour la génération ».
Est-ce grâce à la truffe que Louis XV et Marie Leczinska eurent, en effet, beaucoup d’enfants ?
Curnonsky nous donne aussi la recette du « bifteck aphrodisiaque« , « le bifteck au poivre de mon fils en gueule ». Pas trop épais, taillé dans le filet, un peu aplati de chaque côté, assaisonné de poivre mélangé de muscade, gingembre, pignon pilé. Passé au gril. On fait sur une assiette creuse un lit de feuilles de roquette finement hachées. On y place le bifteck avec du beurre. Il parait que l’homme qui a mangé ce bifteck est capable d’enterrer douze fois Hercule dans les douze heures qui suivent ».
Et le poisson ? Aphrodisiaque encore, à tel point que Moïse dut en réglementer la consommation : « faut-il voir dans les propriétés du poisson une attention délicate de la Providence pour apporter un dédommagement aux personnes pieuses qui se privent pendant le Carême ? » telle est la malicieuse question que se pose Curnonsky.
Brillat-Savarin attribuait lui aussi un pouvoir aphrodisiaque au poisson. Il raconte à ce sujet l’histoire du sultan Saladin qui voulait éprouver la continence de deux saints derviches. La première semaine il les fait nourrir exclusivement de viande et leur présente deux odalisques d’une beauté toute puissante. « Mais elles échouèrent dans leurs attaques les mieux dirigées, et les deux saints sortirent d’une épreuve aussi délicate purs comme le diamant de Visapour ». Le sultan entêté, ou sadique, réitéra sa tentative – cette fois avec du poisson. Au bout de huit jours les pauvres saints avaient succombé.
Quant à Rabelais qui se piquait, comme on le sait, d’herboristerie, nous trouvons sous sa plume la liste des… anaphrodisiaques : « amérine, sauge, chénevé, tamarix, mandragore, ciguë, orchis et aultres lesquelles dedans les corps humains, tant par leurs vertus élémentaires que par leurs propriétés spécifiques, glacent et mortifient le germe prolifique. »
Bon, alors, avez-vous choisi votre menu
pour ce soir cher(es) ami(e)s ?
Superbe billet ! surtout en début de WE.
Je vais tester quelques recettes avec beaucoup de plaisir.
Merci de passer sur mon blog 😉
Cricrix
J’ai un faible pour le steack de Curnonski…
Un bien agréable moment la lecture de ton billet. Merci Bon WE. Bises
comme tiusha, le steack me tente… avec un beau vin rouge velouté et profond….
Bonjour Marie-France,
Contente de te connaitre et de partager avec toi le bonheur de la bonne cuisine et des pages littéraires plaisantes.
J’ai beaucoup aimé ton blog et je reviendrai te voir souvent pour me familiariser avec tes recettes vendéennes et autres…
Avec toute mon amitié.
Henriette
j’ai choisi le steak évidemment !!!
le week end sera hot!
bises
les épices bien sûr !
Rt il me semble que ce livre est un parfait livre de chevet ! à cette page là d’ailleurs ……
C’est un vrai plaisir de te lire Marie-France et pour ce qui est de l’offre faite…. Hum,merci mais je crois que je vais en rester aux bonnes huîtres creuses de Vendée… Voui! 🙂
Bisous ma jolie.
Moïsette